L’intelligence collective à grande échelle, la nouvelle « licence to operate »​ de nos entreprises​ et institutions

Construire son plan stratégique en mobilisant tous ses salariés, impliquer ses parties prenantes à grande échelle pour écrire sa vision ou sa raison d’être, réaliser un plan de compétitivité avec tous les corps de métier, revoir son portefeuille d’offres avec l’ensemble de ses clients, dialoguer avec les citoyens pour créer la confiance et élaborer des solutions acceptables… A l’approche de 2020, l’élaboration d’une stratégie plus robuste et légitime en impliquant activement ses parties prenantes devient-elle une obligation ?

Un point de bascule pour nos entreprises et institutions ?

Nous le sentons en tant que citoyens, salariés et habitants, mais aussi avec des signes majeurs comme la création du statut d’entreprise à mission ou la possibilité de se doter d’une raison d’être pour nos entreprises épuisées par les modèles classiques : notre système semble se trouver sur un point de bascule. Nous vivons un moment instable où le système hésite entre a minima deux grandes options. En compétition sportive, c’est le moment où le corps atteint une limite entre ses besoins fondamentaux (oxygène, sucre) et son désir de performance, qui plus est décuplé par l’adrénaline de l’effort. Pour nos entreprises et institutions, l’hésitation est peut-être entre ces deux alternatives :

=> Un modèle plus transparent, basé sur la montée en puissance des populations et de leur intelligence par l’éducation et la qualité de l’information, sur la coopération et la conviction que le système qui sert à « décider » et celui qui sert à « faire » sont du même monde. Une sorte de volonté de liberté éclairée, de construction entre les faiseurs et les décideurs, et une nouvelle attente : que les faiseurs participent aux décisions et que les décideurs fassent, eux aussi, concrètement avancer les choses.

=> Et un autre modèle plus guidé par la notion de cercles resserrés et sur-performants qui doivent guider le monde, de décision liée à une vision personnelle venue d’un(e) l’Homme/Femme providentiel(le), et sur la conviction que le système qui sert à « faire et celui qui aide à « décider » sont deux mondes à part qui doivent se côtoyer via des interfaces clairement délimitées.

D’après toutes les études politiques de cette dernière année, le second modèle ne mérite plus d’exister au yeux du plus grand nombre.

C’est la définition même de la licence-to-operate : mériter d’exercer son activité aux yeux des autres, sans quoi le rejet par les populations la rend inopérable.

Des opportunités cohabitent avec de dures réalités

La journée « Open Stratégie Positive » (créée et animée par bluenove et Eurogroup Consulting), réunissant 7 entreprises fut une belle illustration de ce point de bascule. Les organisations présentes, issues des secteurs de l’énergie, l’assurance, l’industrie automobile, et du secteur public, ont partagé les opportunités et les freins qu’elles sont en train de vivre pour passer du second modèle au premier.

Quelques opportunités qui sont ressorties :

  • Une urgence à se transformer dans des environnements mouvants et complexes, l’attente historique d’un modèle nouveau
  • Un rôle attendu de la Direction Générale pour impulser ce changement : le besoin de basculer vers une stratégie plus ouverte et positive n’est plus seulement une obligation pour la Direction RSE ou Développement Durable
  • L’apparition d »une nouvelle génération de dirigeants enclins à servir les enjeux de responsabilité et de durabilité, et à impliquer largement les parties prenantes dans son avenir
  • La maturité des nouvelles techniques et technologies d’intelligence collective pour permettre une meilleure aide à la décision et une mise en action robuste.

A contrario, les freins vécus :

  • Des organisations en silo, une absence néfaste de transversalité pour permettre à une vision universelle et une manière d’agir plus performante de voir le jour
  • En miroir des nouvelles techniques de co-construction, une envie forte d’être formé ou accompagné pour mettre en œuvre ces démarches novatrices et attendues
  • Un « turn over » important des profils internes, rendant difficile l’inscription dans le temps moyen ou long
  • Une lenteur des processus décisionnels qui empêche cette dynamique spontanée de démarrer, et à l’inverse, une ambiance d’urgence qui pourrait conduire à de mauvais choix stratégiques.

 Le 21ème siècle va-t-il voir naître une nouvelle nature de dirigeants ?

Dès lors, et si nous pensons que la dominance du premier modèle devient nécessaire, quels leviers s’offrent à nous ?

=> Former, montrer et démontrer que les méthodes et outils d’aujourd’hui permettent les meilleures décisions et la meilleure performance par la mobilisation des bons collectifs aux bons moments

=> Renouer avec la reconnaissance des postes de longue durée : être un Manager performant avec la même équipe pendant 10 ans est peut-être finalement plus difficile et sain que changer de poste tous les 2 ans pour passer Directeur. Devons-nous enterrer l’envie de mobilité à tout prix et inciter chacun à prendre des décisions robustes à horizon 2030 ?

=> Favoriser la nomination et la progression de décideurs qui savent activer la transversalité et autoriser à prendre des décisions, dès qu’elles sont bien instruites sans se calquer sur une agenda ou un cycle de vie décisionnel, qui existe par habitude ou nécessité politique

=> Appuyer ses décisions et son action sur la contribution du plus grand nombre, qui couplée à l’expertise, devient robuste et légitime

Finalement, l’ère qui démarre sera peut-être bien celle des dirigeants qui cumulent créativité, dynamique collective, rigueur et résilience. Elle sera peut-être le début des entreprises dont le/la PDG est (enfin) augmenté par les foules pour décider.

 

Pour participer à la prochaine journée Open Stratégie Positive de bluenove et Eurogroup Consulting ce 29 novembre 2019, contactez-moi : natacha.dufour@bluenove.com